EN LIVE AVEC LES STARS !

Publié le par corsu61

Cette catégorie vous permet de découvrir les stars sous leur vrai jour, et non celui qu'elles veulent bien montrer par l'intermédiaire de leur agent, leur attaché de presse, ou leur prestation dans une émission de télévision.

Pour cela, profitant de mon expérience de plusieurs années dans le domaine de l'interview, je vous propose le récapitulatif des rencontres que j'ai pu avoir avec vos acteurs ou actrices préférés, et je vous joins les interviews correspondantes.

Tout vous est relaté, sans fard ni dissimulation, et sans aucune langue de bois. Vous allez découvrir que certaines stars sont loin de l'image que l'on veut donner d'elles, que ce soit en bien ou en mal.

N'hésitez pas à me laisser vos commentaires pour me relater vos
impressions.... Alors, bon voyage de l'autre côté du miroir...

Aujourd'hui :

EN LIVE AVEC LES STARS !

Mercredi 05 août 2015. J'ai rendez-vous avec le comédien dans son "antre" de la montagne balanaise.

Isolé dans les superbes décors du parc naturel de Haute-Corse, il y préside les 18èmes rencontres internationales de théâtre d'Olmi-Cappella, sous l'égide de son association : l'ARIA (voir article du 7 août 2015, dans la catégorie "Interviews diverses").

Je rencontre Robin Renucci dans le splendide bâtiment principal : "La forge". Désireux que nous nous installions au milieu de la grande salle, il va immédiatement chercher deux bancs et les met en place lui-même.

D'emblée, il saute aux yeux que Robin Renucci n'est pas homme à s'en laisser compter. D'abord méfiant, mais très cordial, il va lentement se dévoiler comme je le pressentais : un farouche adversaire du star system, amoureux fou du théâtre et des mots, ainsi que de la précision des faits...

C'est dans ce cadre et cette ambiance particulière que mon interview va pouvoir débuter...

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Tout d'abord, je tiens à vous remercier d'avoir accepté de me recevoir...

Mais je vous en prie.

Père gendarme et mère couturière... Apparemment, rien ne vous prédisposait à devenir comédien...

Sinon le port du costume au sein de la famille...

Ca a joué ?

J'imagine...Un gendarme a des panoplies, des costumes, des armes. Une couturière fait des costumes, des robes... Mais c'est surtout parce que ma mère a travaillé, d'une manière fortuite, dans un théâtre municipal, que les acteurs sont rentrés dans la maison. A partir de ce moment là, les choses ont changé pour moi parce que j'étais adolescent...

Vous vous destiniez à quel métier ?

Ah... je ne sais pas du tout ! Peut-être... (Il s'interrompt et réfléchit)... J'avais déjà une propension à la transmission... A l'époque, on disait que les gens pauvres rêvaient que leurs enfants deviennent maîtres ou maîtresses d'école...  Dans la tête de mes parents (du moins ma mère), j'étais donc peut-être dévolu, programmé, à devenir instituteur, si j'en avais eu les capacités. Et je le suis devenu d'une certaine manière...

Que s'est-il passé quand vous leur avez annoncé que vous vouliez faire du théâtre ?

Et bien ça ne s'est pas trop mal passé ! J'avais 16 ans et demi. J'ai commencé avec des gens auxquels je dois ressembler aujourd'hui, c'est à dire des humains attentifs à l'éclosion et à l'épanouissement des autres. Des gens qui avaient une propension à faire du bien. Je pense que mes parents l'ont vu dans les rapports qu'ils ont eu, d'emblée, avec les directeurs de stages ou les gens chez lequels j'allais travailler et me former. En ce qui me concerne, tout est venu comme ça, avec une bonne formation et dans des lieux généreux et attentifs. Mes parents se sont donc aperçus que j'allais évoluer dans un bon environnement et un bon entourage.

Assez rapidement, vous avez fait partie de la catégorie des séducteurs du cinéma français. Comment avez-vous vécu cette période ? D'ailleurs, sur internet, il y a une phrase qui est censée vous résumer : "séducteur à la sensible personnalité légèrement ombrageuse...". Ca vous correspond ?

 

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Je ne crois pas. Je ne crois pas du tout ! C'est simplement qu'à un certain moment, j'ai joué un ou deux films dans lesquels j'interprétais ce genre de rôle. C'était quand j'ai commencé à faire du cinéma, dans les années 80. D'ailleurs, ça ne me convenait pas du tout !

Ah ?

Par principe ! Eu égard à ce que j'évoquais auparavant concernant la rencontre avec l'humanisme, les gens attentifs aux autres... L'attention... Le fait d'être attentionné, attentif au parcours de quelqu'un... Le cinéma, c'est tout le contraire !! C'est un milieu au sein duquel on prend et on jette les individus ! C'est un marché, un marché important. Il peut s'y passer des choses très belles comme il peut y avoir des familles résistantes à ce principe, mais ce marché dévore facilement et il est très amateur de chair fraîche. Voilà ! Ca se passe quand on est très jeune. Mais moi, j'avais eu ma formation bien en amont, par rapport à celle que j'ai évoquée, c'est à dire ma formation théâtrale. J'avais des appuis beaucoup plus importants que la déstabilisation cinématographique. 

A un moment donné, vous vous êtes retrouvé dans ce qu'on appelle aujourd'hui "les acteurs bankables". Ca ne vous correspond donc pas du tout ?

Ah pas du tout ! Ca m'est totalement étranger. Ce n'est pas ce que j'avais ressenti et vécu au tout début. Ensuite, je m'en suis même fait un cheminement personnel : ne pas aller dans ce sens là.

Alors, qu'en effet, j'étais appelé à ça, je n'ai pas voulu en faire partie.

Mais c'était pourtant la voie royale !

On peut l'appeler comme ça, mais je connais tellement de solitudes et de malheurs individuels chez les acteurs que ce n'était surtout pas la carrière que j'avais envie d'embrasser ! Le principe du vedettariat... C'est quelque chose qui est antinomique avec ce que j'ai envie de faire, avec mon chemin personnel. Je ne dis pas qu'une vedette, ce n'est pas bien. Je dis simplement que ce n'est pas mon chemin. Et de surcroît, si je regarde de l'intérieur, j'y vois souvent beaucoup de souffrance, de malheur, d'égoïsme, de perte d'identité, au profit d'un égo très affirmé et d'un épanouissement pour certains... Parce qu'il y a des gens pour lesquels c'est très important.

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C'est très étonnant ce que vous me dites. Parce que l'égo est tout de même une des pierres angulaires de votre métier...

Je ne crois pas que ce soit une des pierres angulaires... La pierre angulaire est sans doute l'individuation, c'est à dire le fait que chacun devient ce qu'il est profondément, au fur et à mesure du déroulement de sa vie. Mais au cours de ce déroulement (pour parler du vedettariat), vous échappez à vous-même, vous êtes même alliéné au sens étymologique. Vous êtes étranger à vous-même et vous n'êtes donc pas ce que vous êtes vraiment. Cela pose problème ! Et ça arrive très souvent chez les acteurs. Regardez Brigitte Bardot !...(Il réfléchit)... C'est absurde, je ne sais pas pourquoi je cite ce nom...

Ce n'est pas absurde. Elle a même quitté son métier pour se consacrer à sa vraie passion : les animaux...

Oui. C'est sans doute pour cela que je vous l'ai citée...

Mais cela concerne aussi des acteurs masculins ! A un moment donné, ils ne se sentent plus à leur place, parce que ce qu'on fait d'eux, ce n'est pas ce qu'ils sont, tout simplement. Ou même ce qu'ils participent à faire d'eux-mêmes ! Tout à l'heure, vous parliez de la séduction... On veut rester jeune, et surtout garder une place dans une espèce de peloton, de compétitivité, qui fait que tout devient insupportable. C'est une problèmatique !

Quand à 20-25 ans, on gagne énormément d'argent, ce qui a été mon cas, on peut vite être déstabilisé. Dans le cinéma, on gagne des sommes colossales si nos films ont du succès. Mais si, avant cela, vous n'avez pas acquis une vraie stabilité, si vous ne savez plus où sont vos vrais repères, vous pouvez plonger ! Tomber dans la démesure, une fuite en avant, un "toujours plus"...

Et ça ne vous est pas arrivé ?

Ah pas du tout !! D'ailleurs c'est même très clair ! Si vous regardez mon parcours, c'est au moment où j'ai eu mes plus grands succès cinématographiques que je suis parti 18 mois faire du théatre ! 

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Après avoir fait "Escalier C" de Jean-Charles Tacchella, je suis parti jouer 18 mois "Le soulier de satin" avec Antoine Vitez, à Avignon, puis en tournée mondiale. J'ai donc laissé tomber, dans un moment de "cueillette fructifiante" et de capitalisation, ce que je ne croyais pas essentiel. Je pense que ça a été une force de caractère de ma part...

C'est indéniable... (Je souris)...

Et quand je vous vois ici, dans ce lieu que j'ai fondé, et que je regarde mon parcours au jour d'aujourd'hui, je suis nettement plus épanoui et satisfait, sans flagornerie ni fatuité aucune. Je préfère nettement avoir pu créer des choses qui correspondent à ma nature et dans un rapport différent avec le monde et le public, que d'être un égotique gagnant plusieurs centaines de milliers d'euros par film en attendant le prochain rôle dans un film qui devra absolument être un succès financier ! Un peu comme aux Etats-Unis où l'on compte en dollars la réussite d'un film. Ou l'on juge un film sur son audience et non sur sa qualité intrinsèque...

Il y a donc des acteurs qui sont dans cette course là et qui continuent à l'être (y compris de ma génération). Plus on avance dans l'âge, plus ce peloton est resserré et il reste encore 7 ou 8 acteurs (dont j'ai fait partie) qui ont choisi ce chemin. J'en suis heureux pour eux, mais ce n'est pas le mien. 

Ce qui est intéressant, c'est que quand ils le nommaient, c'était de cette manière : "Je veux devenir vedette !". Lisez mes interviews dans les années 80... Moi, je ne disais jamais ça.

Mais ce qui vous intéressait vraiment, c'était le cinéma ou le théâtre ?

C'était le public. La raison pour laquelle nous faisons cela. La communion qui se produit entre un acteur, serviteur d'un poème dramatique, d'un texte, d'une histoire à raconter, et ce qu'il provoque avec le public. C'est ancestral. Ca existe depuis des milliers d'années. Le cinéma, lui, n'a qu'une centaine d'années.

Au cinéma, vous n'avez donc pas ce rapport avec le public...

Non, il est différé. Votre public, c'est une caméra. De plus, on vous prend. Vous êtes mis en morceaux. Ca s'appelle "une prise". Mais la vie n'est pas qu'un système de mises en morceaux...

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J'aimerais savoir comment vous préparez vos rôles ?

En premier lieu, avec le texte.

S'il y a un bon texte, il y a un bon rôle. S'il n'y a pas de bon texte, il n'y a pas de bon rôle.

Vous vous êtes déclaré "ardent insoumis"...

(Il fait la moue et balaie la question d'un revers de main) Ce n'est pas moi. C'est le titre d'un livre auquel j'ai contribué. Je ne suis pas responsable du titre.

C'est un livre sur vous. Vous êtes forcément d'accord avec son titre...

Je l'ai accepté. Il y en avait plusieurs possibles. Celui-ci sonnait mieux pour la personne qui a fait le livre. En même temps, ce n'est pas faux non plus. C'est une forme d'insoumission mais c'est très relatif. Quand je pense aux réelles insoumissions...

Disons que je ne suis pas soumis aux lois du marché, à un vedettariat et à une économie qui n'est pas que financière. J'ai d'autres désirs d'économie dans la vie, qu'ils soients de dépassement de soi ou d'élévation.

La façon dont vous prononcez le mot "Vedettariat" m'amuse... On dirait une sorte de dégoût...

(Il faut la moue) Non, pas du dégoût...

Du rejet ?

Oui, parce je pense que c'est idiot, tout simplement. C'est idiot et c'est antinomique. C'est à dire que c'est une récupération du monde capitaliste. Avoir des individus qui deviennent des totems, des demis-dieux, pour faire marcher le commerce ! Il y a quelque chose qui ne va pas !

Les propos que vous tenez ressemblent à un discours politico-artistique...

Non. C'est politique.

(Il en parle comme une évidence) Le théâtre est politique. C'est apprendre à vivre ensemble et que chacun ait sa place. Qu'une égalité existe, qu'il y ait une reconnaissance de l'autre, qu'une altérité existe. C'est le théâtre !

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Les grecs ont inventé le théâtre pour vivre ensemble ! Sauf si la politique veut dire autre chose que ça... Mais pour moi, c'est une chose très noble qui consiste à pouvoir élever la pulsonnalité des individus que nous sommes, c'est à dire des mammifères, à un degré d'humanité non-inhumaine.

Il y a des outils pour cela : la parole, la représentation, le champ symbolique théâtral permettent de réguler la pulsonnalité d'une société. C'est ce que les grecs ont inventé et c'est ce que nous faisons ici, à l'ARIA, et vous le verrez si vous nous consacrez un peu de votre temps. Parlez au public et vous verrez pourquoi il est là. Il n'est pas là pour je ne sais quel truc de vedettariat ou de commerce. Ca n'existe pas ici. Personne n'achète de place de théâtre ici. Ce n'est pas le principe. On devient adhérent d'une association et on s'unit pour améliorer un projet.

Qu'y a t-il de commun entre les politiques et les artistes ? C'est qu'ils sont en train de vivre la société comme tout le monde, d'en donner des représentations et d'en prévoir, d'en imaginer, une amélioration.

On regarde le monde, on le constate, on le transforme. C'est pour cela que c'est un champ politique.

Quel est le plus mauvais souvenir de votre carrière ?

Franchement, je n'en ai pas.

Vous avez toujours fait les bons choix ?

Oui. Je n'ai fait que des bons choix. Après, artistiquement, il y a peut-être des choses moins bonnes que d'autres, sans doute.  Par contre, au théâtre, je n'ai vraiment fait que des bons choix. On y passe trop d'énergie pour se tromper sur les textes. Quant au cinéma, j'ai tenté de travailler avec des gens qui sont des artisans. Claude Chabrol, Michel Deville...

J'avais justement noté ça. Vous avez tourné pour Chabrol, Tacchella, Deville, Bertolucci, Hossein, Corneau, etc... Le choix du metteur en scène est primordial pour vous ?

Ah oui ! Le texte, et ensuite le metteur en scène. Mais les deux sont liés ! Le metteur en scène est le chef d'orchestre qui est responsable. C'est le récit, celui qui raconte. L'acteur, lui, n'est pas responsable. Il n'est que la tête de gondole...

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Racontez nous l'aventure de l'ARIA (Association des Rencontres Internationales Artistiques)...(dont voici l'adresse du site officiel : http://www.ariacorse.net/fr/)

En fait, c'est une aventure de fidélité. Ma fidélité à ce territoire dont ma mère était originaire. C'est ici que j'ai appris à marcher... C'est un lieu tout à fait merveilleux de nature et également de gens.

Il y avait quelque chose de très fondateur pour moi. Donc, fidélité à ce territoire et à la question d'éducation populaire dans laquelle je suis arrivé dans les années 1975, avant ma formation théâtrale et cinématographique.

Une fois réunis tous ces éléments (le territoire, ce qui me passionnait et la réflexion que cela m'a amené, en y ajoutant le "faire avec les autres"), je me suis projeté. Je me suis demandé si on pouvait laisser s'effondrer un bâtiment qui a été dévolu à l'éducation depuis deux siècles (le bâtiment Battaglini qui était un établissement scolaire). On pouvait donc en faire un lieu d'hébergement qui fonctionnerait toute l'année et qui accueillerait des stagiaires. On pouvait également contribuer au développement local afin d'éviter l'épuisement de la vallée au niveau de la chute démographique. Je pouvais aussi contribuer à la revitalisation de la population, mais sans en être personnellement le sauveur. Je n'ai pas du tout cette vocation et ce n'est pas de ma part de la fausse modestie. On ne construit pas quelque chose si on est sauveur ! Il faut avoir un peu lu pour se rendre compte de ça... En revanche, on peut en fédérant. J'ai donc été fédérateur, j'ai beaucoup parlé avec les élus, la population, et dès 1998, ils ont tous compris le projet qui consistait à désegmenter ce qui est souvent cisaillé, c'est à dire la différence entre les professionnels et les amateurs. Après tout, qu'est ce qu'on est d'autre qu'un jeune amateur quand on a 16 ans ? Donc, ne pas tomber dans l'idée qu'il y a les vedettes et ceux qui vont acheter leurs produits, comme au festival de Cannes où les gens sont derrière des barrières à espérer des autographes...Ce à quoi vous avez régulièrement à faire, car j'ai compris que votre site "SOS MOVIES" est beaucoup lié à la question du cinéma et le fait de savoir qui se cache derrière les producteurs de symboles que sont les vedettes, les acteurs, etc...

Pour moi, il fallait écrêter cette frontière très solide qu'il y a entre les artistes et le public, et ça, il n'y a pas beaucoup d'endroits où on peut le faire... Avoir un lien direct avec les artistes, dans la pratique... Mélanger corps enseignants, professionnels et amateurs, éducateurs et participants de pays étrangers, j'ai trouvé que c'était beau que ça se passe ici, dans ce parc naturel de Corse. Et aussi transformer notre handicap en atout ! En arrivant ici, vous m'avez dit : "c'est loin". Et bien oui, c'est loin et c'est parce que c'est loin que c'est bien ! Et c'est parce que c'est loin qu'on travaille bien, qu'on est en résidence et qu'il n'y a pas beaucoup de monde...

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Au bout d'un moment, c'était tellement performant qu'on s'est dit qu'il fallait construire des équipements...

(Je le coupe) Avant, ça se passait où exactement ?

Ici, dans les 4 villages.

Mais en plein air ?

Absolument. Il y a donc des élus qui ont compris le projet, qui ont créé l'entité afin de recevoir les fonds régionaux, nationaux et européens, et surtout faire un équipement qui corresponde exactement à ce que je vous raconte. Ce n'est pas du tout un théâtre car nous ne sommes pas dans un lieu de diffusion, mais plutôt de formation et de transmission.

Parlons télévision... "Un village français" a reçu un excellent accueil de la part du public...

Alors autant je vous ai dit ce que je pensais du cinéma, c'est à dire "attention à l'industrie de programmes basée essentiellement sur la reconnaissance économique", autant je dirais "attention à ne pas laisser la télévision aux marchands de soupe !". La technique télévisuelle ou radiophonique a été créée pour l'éducation populaire et l'échange entre les gens. Or, depuis 40 ans, c'est une technique au bénéfice des industries de programmes pour les vendeurs de publicité, etc... Il faut donc continuer à y présenter des programmes les plus assidus et forts possible au niveau de leur écriture. Quand il y a 7 ans, nous avons décidé, avec les producteurs (car j'ai été la première personne à avoir été contactée), de faire "Un village français", nous avons pensé à la longévité de la chose. J'ai accepté l'idée que cela se fasse sur plusieurs années et ce qui me plaisait, c'est que cela ne pouvait se faire qu'à la télévision, pas au cinéma. 72 heures de programme, cela ne peut se faire qu'à la télévision !

Quand on regarde "Un village français", on réfléchit à sa société, à la façon dont nous aurions agi à cette époque. Il y a une analyse qui a été très bien étudiée du contexte politique des années 1939-1945, avec, sans aucune relation de comparaison, mais avec des sentiments que l'on peut retrouver actuellement en ce qui concerne l'exclusion, la peur de l'étranger, etc... Des choses très concrètes que nous vivons aujourd'hui avec la montée du Front National.

Vous la craignez ?

 La montée du Front National ? Je crains tous les totalitarismes, quels qu'ils soient.

Je crois aux individus capables d'être auteurs de leurs actes et surtout capables d'affirmer leur propre singularité.

Quel serait, pour vous, le modèle de société parfait ?

(Il réfléchit)... Une société héléniste réactualisée, c'est à dire où chacun a sa place et dans laquelle l'homme est capable de penser, et non de se battre comme dans la société dans laquelle nous sommes.

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A l'heure actuelle, nous avons des hommes qui, au lieu d'avoir des mots pour règler des conflits, se cognent la gueule et se font la guerre... Les sociétés dans lesquelles nous sommes sont catastrophiques, en chute. Je rêve d'une utopie, ce que nous créons ici dans notre enceinte de travail, où les gens sont respectés pour ce qu'ils sont. Une société dans laquelle chacun a sa place et est auteur de sa pensée.

En fait, vous êtes une sorte de philosophe passionné...

(Il souffle)... Je ne sais pas...

A vous écouter, je me demande comment vous arrivez à rester calme avec tout ce qui se passe actuellement dans le Monde...

Mais je suis un guerrier ! Il faut se battre ! Je me bats avec des idées et des actes.

J'ai l'impression qu'il n'a pas grand chose qui peut vous abattre...

Si. Mais j'ai bientôt 60 ans et j'ai vu et vécu beaucoup de choses. J'ai eu la chance d'éviter des écueils et je continue à avoir une haute idée de l'homme. Je mise toujours sur l'intelligence des gens et non sur leur capacité destructrice. Mais je ne suis pas pour autant angéliste. L'utopie, pour moi, est une chose très concrète et pas du tout abstraite. Et nous avons contribué à ce qu'elle soit existante, la preuve avec l'endroit où nous sommes !

Si vous aviez le pouvoir de voyager dans le temps, que changeriez-vous dans votre vie ?

Rien. Pour moi, c'est vain. Je vis dans un monde qui m'intéresse et dans lequel j'ai ma place. Si je pensais à vivre à telle ou telle époque, j'aurais l'impression de perdre mon temps. Vivre au 18ème ou 19ème siècle ? Non. Je pense que les gens étaient bien plus malheureux que nous ne le sommes actuellement, notamment sur les questions de confort. Le monde est de plus en plus confortable. Ce qui s'est accru, c'est sans doute l'écart entre ceux qui sont nantis et ceux qui n'ont rien. Mais ça existe depuis la nuit des temps.

Vous êtes un curieux ?

Ah oui. J'ai toujours envie d'en savoir plus sur tout.

Que conseilleriez-vous à un jeune qui veut être acteur ?

Il est normal qu'à 17 ou 18 ans, on ne sache pas précisément pourquoi on veut faire ça. Notre travail, c'est d'abord de respecter ce désir et tenter de l'aider à devenir lui-même, à s'accomplir.

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On a parlé de vedettariat, et j'ai bien compris que vous le fuyez, mais il a bien dû vous servir pour créer tout cela...

Ce n'est pas le vedettariat qui m'a servi, puisque je ne l'ai jamais pratiqué ! C'est la notoriété !

(Je fais la moue)

( Il me reprend) Non, ce n'est pas pareil !

Ah bon ? Et quelle est la différence ?

Et bien prenez, par exemple, Charles Dullin. Pour moi, il a une grande notoriété. il a vécu jusqu'à 70 ans en laissant des traces très importantes sur la formation théâtrale. Il avait une grande notoriété mais ce n'était pas pour autant une vedette. Sheila ou Brigitte Bardot sont connues comme des vedettes. Et je n'ai pas du tout envie d'avoir le parcours de l'une ou de l'autre, ni celui d'Alain Delon ou Gérard Depardieu...

Il n'est évidemment pas dans mon idée de déprécier Mr Delon ou Mr Depardieu, mais ce sont des vedettes. Ils ont une grande notoriété, doublée d'un culte de la personnalité. Et je trouve ça très vain, tout simplement.

Mais ici, avec ce que nous faisons tous ensemble, acquérir une plus grande notoriété qui nous permettrait de décupler notre activité, ça c'est mon souhait ! Je participe à cela avec prosélytisme.

Pour aller jusqu'où ?

Jusqu'à ce que le monde continue à se teinter et à se colorer d'une autre pensée, plus humaniste, plus généreuse, basée sur la mutualisation, la rencontre, la reconnaissance et la singularité de chacun. Plutôt qu'un monde dans lequel des gens ont un pouvoir sur les autres...

Que ressentez-vous devant le succès de votre entreprise ?

Je suis modeste car le succès n'est jamais acquis. Il y a encore beaucoup de gens à conquérir, à accompagner dans leur perception. Beaucoup de gens ne connaissent toujours pas notre activité et si j'ai accepté cette interview, c'est parce que je sais que vous allez continuer à faire entendre la réalité et la vérité de cet endroit.

Et bien notre entretien se termine et, effectivement, j'encourage tous les amateurs de théâtre à venir à votre rencontre dans ce lieu unique.

Merci beaucoup et je vous souhaite une très bonne journée.

 

Reportage photo réalisé par Erica Lavalle

Reportage photo réalisé par Erica Lavalle

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D
Un homme étonnant dont je ne connaissais pas la force de caractère. Une bien belle découverte. Merci beaucoup
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P
Merci l'ami pour ce duel de haute volee correspondant en tous points a ce que tu m avais dit.
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