EN LIVE AVEC LES STARS !!
Cette catégorie vous permet de découvrir les stars sous leur vrai jour, et non celui qu'elles veulent bien montrer par l'intermédiaire de leur agent, leur attaché de presse, ou leur prestation dans une émission de télévision.
Pour cela, profitant de mon expérience de plusieurs années dans le domaine de l'interview, je vous propose le récapitulatif des rencontres que j'ai pu avoir avec vos acteurs ou actrices préférés, et je vous joins les interviews correspondantes.
Tout vous est relaté, sans fard ni dissimulation, et sans aucune langue de bois. Vous allez découvrir que certaines stars sont loin de l'image que l'on veut donner d'elles, que ce soit en bien ou en mal.
N'hésitez pas à me laisser vos commentaires pour me relater vos impressions.... Alors, bon voyage de l'autre côté du miroir...
Aujourd'hui :
(première partie)
Samedi 23 janvier 2010. La comédienne est venue présenter le spectacle « Au fil de l'eau » au Théâtre municipal de Bastia.
Cet article va vous faire découvrir une femme et une actrice incroyablement passionnée, littéralement transportée lorsque l'on évoque certains pans de son métier, et qui ne manie pas la langue de bois. Son fort caractère est aisément perceptible, mais il n'arrive pas à dissimuler une sensibilité à fleur de peau. Lorsqu'elle s'adresse à vous de sa voix calme et douce, elle vous regarde droit dans les yeux, soutient votre regard, et le sien, bleu azur, devient très vite captivant. Marie-Christine Barrault est une femme qui, malgré sa notoriété, a su rester simple (certains devraient prendre exemple...voir certains articles antérieurs). Elle est curieuse de tout, a beaucoup d'humour, est très professionnelle, et elle se montre soucieuse de l'image qu'elle donne sur papier glacé. J'ai eu l'impression qu'elle était tout d'abord sur la réserve, mais que ses craintes se sont dissipées au fur et à mesure de notre entretien. J'ai passé un moment captivant (1h10 d'entretien), véritablement passionnant, et je ne peux que vous encourager à vous déplacer dans les théâtres pour profiter du talent de cette grande comédienne...
Mais tout d'abord, une petite rétrospective des évènements qui m'ont conduit à la rencontrer :
Je contacte son agent le lundi afin de pouvoir programmer notre rencontre. La comédienne me recontacte directement par téléphone pour en savoir plus sur la rencontre prévue, mais me précise qu'elle sera indisponible le samedi (date de la représentation) car elle répète avec son partenaire toute la journée. Cependant, elle me précise que, si tout se déroule correctement, elle sera disponible le vendredi soir, jour de son arrivée. Elle m'appellera de l'aéroport pour me préciser l'heure de l'interview.
Effectivement, le vendredi soir, elle me rappelle pour me confirmer son arrivée et l'on convient de se rencontrer une heure plus tard.
18h30. J'arrive à son hôtel et le réceptionniste m'indique qu'elle est arrivée depuis 5 minutes. Je décide de lui laisser le temps de prendre ses aises, et j'en profite pour m'installer dans le petit salon. Anecdote amusante : ce dernier dispose de deux fauteuils et de deux canapés. Je m'installe sur un canapé pour que l'actrice puisse profiter d'un des fauteuils, que je trouve très confortables. Le réceptionniste vient à ma rencontre et me dit que, fort de son expérience, il n'est pas de bon ton de prendre le canapé, ce dernier étant toujours laissé à la disposition des personnes importantes. Étonné, je quitte ma place et m'installe dans un fauteuil. Marie-Christine Barrault arrive, souriante et apparemment détendue. Elle nous salue et s'installe......dans l'autre fauteuil ! Un petit regard rapide et goguenard au réceptionniste pour lui signifier que ses "conseils" ne sont pas tout à fait judicieux, et l'interview peut commencer...
Votre appareil posé sur la table, c'est pour vous souvenir de ce que l'on dit ?
Oui, tout à fait. C'est pour une retranscription fidèle sur le site. Vous êtes allée le consulter ?
Non, je n'ai pas le temps. Mais j'irai le voir dès que vous me direz que cet article est en ligne. Et encore, je n'ai aucune curiosité...
Vous n'êtes pas curieuse de ce que l'on écrit sur vous ?
Non. Je m'en fous complètement. Franchement !
Cela vous est complètement égal ?
Je regrette quand ce sont de grosses âneries ! Vous savez, je donne très peu d'interviews ! Et celles que je donne, je les donne à des gens que je connais, à des journaux que je connais, je ne les donne pas au hasard.
Alors pourquoi avoir accepté la mienne ?
Je ne sais pas... D'abord, vous m'avez dit que vous aviez fait Michel Bouquet, ça c'est pas mal ! Vous savez, c'est assez spécial. Je trouve que les interviews, ce n'est jamais exact. Ce n'est jamais ce que l'on a dit.
On voit que vous n'êtes pas encore allée sur mon site, car il est connu pour ne jamais changer, ni en bien ni en mal, le contenu de ce que vous me direz...
Vous savez, ce n'est pas tout à fait juste quand je dis que je ne donne jamais d'interviews. Au cours de mes tournées, on me demande de répondre d'avance, au téléphone, à un journaliste. Et donc, c'est par ce moyen que sont faites les interviews. Finalement, cela finit par en faire un certain nombre, et par exemple, quand on me dit : "tu as vu...dans tel journal, tu as une interview ! ". Je réponds : "Ah oui ?" et puis la plupart du temps je ne la lis pas. C'est inutile. Je sais ce que j'ai dit, alors au mieux, c'est ce que j'ai dit donc je ne suis pas surprise, au pire ce n'est pas ce que j'ai dit, et à ce moment là, il vaut mieux que je ne la lise pas !! (elle rit).
Personnellement, je refuse les interviews par téléphone car il n'y a pas le contact humain que j'essaie de faire ressentir à mes lecteurs...
Quelquefois, il y a de bonnes sensations au téléphone. (Elle me glisse tout bas) "Vous croyez que l'on peut demander un verre d'eau, ou quelque chose ? J'ai soif.."
Amusé, je lui réponds que oui, et après qu'on lui ait apporté une bouteille d'eau gazeuse locale, l'interview reprend.
J'aime beaucoup boire l'eau du pays dans lequel je suis. Bref, reprenons...
Non. Cela m'a beaucoup agacée au début parce que je n'ai eu aucun appui de ma famille. Ils ont tout fait pour me décourager et ils ne se sont pas du tout intéressés à ce que je faisais. Mais au début, le fait qu'on parlait toujours de moi en me reliant à Jean-Louis Barrault ou à Madeleine Renaud faisait que les gens étaient en droit de croire que j'étais soutenue par ma famille. Ce qui n'était vraiment pas le cas ! Alors aujourd'hui, je peux en parler calmement et sereinement parce que, vu le chemin que j'ai fait sans eux, cela paraît évident que ce n'est pas grâce à eux. Mais, on parlait d'internet tout à l'heure... il y a des organisateurs de festival qui ne veulent pas m'embêter avec les biographies, alors ils vont sur internet et il y en a une par exemple qui disait : "elle a débuté avec son oncle, qui l'a mise sur les planches..." (elle rit)... Oh, j'ai la tête qui enfle quand je vois ça ! J'ai envie de hurler en disant "Ben dis donc, on ne peut pas être plus loin de la vérité !!". Mais bon... en même temps, cela m'est un peu égal, sauf que je n'ai pas envie que cela soit écrit ! Et d'ailleurs, mais on ne va pas faire toute l'interview là dessus, je n'ai jamais vraiment compris pourquoi ils s'étaient autant opposés à mon désir d'être actrice, car après tout, je ne leur demandais rien. J'ai été assez dissimulatrice comme petite fille et comme adolescente car je subodorais qu'à partir du moment où j'allais annoncer que je voulais être actrice, il allait y avoir un tollé général. Je le sentais !... Donc je ne disais rien, sauf à mes amis de cur, mon amie de cur d'école qui est maintenant une femme que j'adore, mon futur mari Daniel Toscan Du Plantier qui était un petit peu dans la confidence, et puis c'est tout ! Et quand j'ai annoncé, après avoir passé mon Bac et avoir fait une année d'hypocagne dans un lycée français de Londres, que maintenant j'allais faire ce que j'ai toujours voulu faire, ma famille a été très surprise ! Elle ne s'y attendait pas, c'est peut- être pour cela qu'ils ont eu cette réaction aussi vive...En même temps, je suis quand même très contente... Je suis très... comment dire ? (elle réfléchit)... les lignées familiales...Je pense qu'aucun de nous ne naît comme ça, de rien. Même les enfants adoptés ne naissent pas de rien. Ils ont une histoire. Alors, on peut remonter plus ou moins loin dans l'histoire selon les vies et les destins de chacun... Et moi, le fait d'être de ce sang là, les Barrault...Du coté de ma mère, il y avait un peintre, elle était pianiste, il y avait des artistes et d'autres qui ne l'étaient pas du tout... Je pense que tout cela forge une personnalité et c'est un peu comme un destin qui est proposé. Après chacun en fait ce qu'il veut...Moi, j'ai toujours pensé être actrice parce que cela correspond à quelque chose de très très profond en moi, qui n'avait rien à voir avec le fait que je m'appelais Barrault. Mais ce fait là m'a quand même fait voir de près de beaux destins d'acteurs, ce que l'on pouvait faire dans ce métier en mettant la barre très haut. Quand j'étais jeune actrice, et qu'on me disait : "tu devrais changer de nom...", je répondais : "A quoi ça sert de changer de nom ? l'important est de savoir qui on est. Le nom importe peu.". Donc, je revendique absolument de m'appeler Barrault, et aujourd'hui encore plus, maintenant qu'ils ne sont plus là... Je suis très fière de m'appeler Barrault et de me dire que peut-être pour certaines personnes je n'ai pas démérité par rapport à ce nom là. Vous savez, quand vous reprenez l'affaire familiale, que ce soit une ferme ou une quincaillerie etc..., je pense que vous avez envie de faire aussi bien que vos parents, sinon mieux... Je trouve que c'est beau de reprendre un sillon... Alors, voilà...Je m'appelle Barrault ! (Elle rit).
C'est un petit peu le même parcours que Claude Brasseur, que j'ai interviewé il n'y a pas longtemps...
Si vos enfants avaient voulu faire ce métier, vous seriez-vous comportée comme votre oncle ?
Ah non ! J'aurais été passionnée !! Un de ma famille, un neveu, un enfant... Si ça arrivait, je serais passionnée !! (elle s'enflamme). Je n'aurais qu'une envie, ce serait de lui donner les bons conseils, d'essayer vraiment de montrer les bonnes voies, les moins bonnes voies... D'ailleurs, énormément de gens m'envoient leurs enfants en me disant qu'il veut être acteur ou actrice... J'aime beaucoup recevoir des gens jeunes et essayer de leur dire : "Qu'est-ce que vous voulez faire dans ce métier, voilà la voie qui est la meilleure..." On sait bien qu'il n'y a pas qu'un seul chemin pour réussir dans ce métier, mais il faut essayer d'être en accord avec soi-même, d'avoir un projet par rapport à ce métier... Ah, j'aurais adoré !! Je suis même frustrée que personne chez moi ne fasse ce métier ! (elle rit)
Vous avez fait vos armes au théâtre, avant de débuter au cinéma sous la direction d'Eric Rohmer. C'était un bon souvenir ?
Ah oui. Débuter avec Rohmer, dans un film comme "Ma nuit chez Maud", ah oui ! Je pense que j'avais le doigt de Dieu sur moi. Vous vous rendez compte que le premier scénario de film que j'ai lu, c'était "Ma nuit chez Maud"! Inutile de vous dire qu'après, je croyais que tout serait de cette qualité là... (elle grimace puis sourit). J'ai déchanté parce qu'après, j'en ai lu des scénarios qui ne valaient pas un clou...En plus, ce n'est pas par hasard que Rohmer m'a engagée. Cela correspondait à mon éducation chez les religieuses, l'éducation chrétienne, la morale... toutes les questions qu'on se posait...Ahhh.. j'étais en plein dedans, c'était magnifique !
Très sereinement. Tout d'abord, entre "Cousin, cousine" et "Ma nuit chez Maud", j'avais fait beaucoup de choses aussi bien au théâtre qu'à la télévision. "Ma nuit chez Maud" était un grand et beau film, mais il m'enfermait, aux yeux des gens, dans un personnage rigoureux, austère. Pour "Cousin, cousine", j'entendais dire "Ah non, on ne peut pas te proposer ce film, il y a une scène de baiser !". Je ne parle même pas d'une scène de baiser comme on dirait aujourd'hui, une scène de lit, mais une scène simplement de baiser. J'étais presque condamnée à jouer les bonnes surs après "Ma nuit chez Maud". Vous vous rendez compte ? La première fois qu'on me voyait au cinéma, la première image, j'étais à la messe ! J'étais marquée ! J'ai donc essayé de tout faire après, mais on n'est pas totalement maître de son destin... On accepte des rôles, on en refuse, mais quand "Cousin, cousine" est arrivé...ouf ! C'était le bienvenu. Un rôle de femme qui se libérait... J'ai adoré faire le film ! Et puis, il est sorti en France où il a eu un succès charmant (elle tempère). Au début... parce qu'après, il a obtenu le prix Louis Delluc. Mais entre-temps, il y a eu les Etats-Unis... Ça a été un truc de fou !! Alors, c'est là que l'on voit que j'ai eu une bonne éducation au sens d'avoir les pieds sur terre. Je n'ai absolument pas été perdue, ni déséquilibrée...
Non. En aucune façon. Ma mère est morte il y a 10 ans. Juste avant, j'avais écrit un livre qui s'appelle "Le cheval dans la pierre". Elle l'a lu, et je raconte un peu de façon superficielle ce qui s'est passé là bas, aux Etats-Unis, mais ma mère ne le croyait pas. Elle me disait : "mais tu ne m'as jamais raconté tout ça !, c'est incroyable tout ce que tu as vécu là bas...Toute cette folie...". Oui, je regardais tout ça en spectatrice en me disant que ça n'allait pas durer, un petit moment à passer, c'était épatant à vivre une fois dans sa vie, c'était rigolo. C'était un peu comme une espèce d'aventure, c'était moi qui était au centre, mais cela aurait pu être quelqu'un d'autre. Ça ne m'a absolument pas fait perdre le fil de mon existence, pas une seconde. Pourtant j'étais sur toutes les chaînes de télévisions, vous n'avez pas idée ! J'ai fait une campagne comme on fait une campagne électorale. J'arrivais à New-York, toutes les shows télévisés me faisait venir, tous les journaux... Après on allait à Los Angeles, et cela recommençait. J'étais invitée partout, je ne pouvais pas rentrer dans une boutique sans que l'on me dise (elle s'exclame) : "Ahhh ...Cousin, cousine !!". C'était une folie totale. On m'a pris une suite au Plaza Hotel qui donnait sur le cinéma Plaza. Ce dernier jouait le film depuis plusieurs mois à guichets fermés. Ils m'avaient pris cette suite pour que je voie les files d'attente qui étaient devant le cinéma toute la journée !! (elle rit de bon coeur). C'était rigolo et insensé. J'ai eu une bonne éducation ! (elle insiste). Si je n'avais pas été quelqu'un de très construit et structuré, j'aurais pu perdre la tête, et me prendre tout d'un coup pour qui je n'étais pas.
C'est Faye Dunaway qui a remporté l'Oscar pour "Network", donc, si j'ai bien compris, vous n'avez pas été déçue outre-mesure...
Je n'ai pas été déçue parce que de toute façon, d'avoir été nominée dans les 5 actrices était déjà du domaine du rêve ! Donc, je n'ai jamais pensé qu'en face de femmes comme Faye Dunaway, Liv Ullmann ou...je ne sais plus qui il y avait encore, j'ai oublié leurs noms... (Sissy Spacek et Talia Shire) j'aurais pu l'emporter. Mais le fait d'être déjà là était pour moi le maximum de ce que je pouvais espérer, donc je n'ai eu aucune déception. Par contre, on a tous été déçus de ne pas avoir l'Oscar du meilleur film étranger qu'on aurait mérité vu le succès du film... Mais c'est là que l'on a compris qu'on avait pas bien appréhendé le système... Il y a un tout petit groupe de gens qui votent pour le film étranger. On croyait que c'était tous les votants ! En fait, on s'était fait une sorte de campagne électorale pour tous les votants, alors qu'il aurait fallu dîner chaque soir avec un des votants (elle rit)... ce qu'ont fait les autres !! (elle rit de nouveau).
Vous avez alterné les rôles dans des registres différents, quel genre préférez-vous ?
Je n'ai pas vraiment alterné. Je n'ai joué jusqu'en 1984 que des rôles sympathiques, des rôles à être aimé par le public en tant que personnage. Je disais tout le temps que je ne pourrais jamais jouer des rôles de composition, parce que je n'ai pas ça en moi, je ne sais jouer que ce que je connais. Et, je ne sais pas pourquoi, j'ai fait en 1984 trois films : "Un amour en Allemagne","Un amour de Swann", et "Les mots pour le dire" d'après le roman de Marie Cardinal. Trois rôles de composition et trois rôles à la limite relativement antipathiques. Et j'ai adoré ! J'ai découvert et j'ai adoré ! A partir de là, je me suis dit que c'était beaucoup plus intéressant ! Cela n'empêche pas les autres rôles, bien entendu, mais voilà une carte qu'il faut absolument jouer, c'est trop passionnant ! Mais j'ai vu aussi que quand on fait ce genre de rôle, on a intérêt à ménager ses arrières parce que les gens confondent assez vite le personnage avec vous. Par exemple, quand j'avais présenté le film "Les mots pour le dire", il y avait des gens qui me disaient (elle prend l'air furieux) : "Vous vous rendez compte, la scène quand vous giflez, quand vous battez votre petite fille, mais c'est honteux !!"... Je leur disais : "Mais attendez, c'est un rôle !" et ils me répondaient : "Oui mais tout de même, vous l'avez fait !!, ça veut dire que vous en êtes capable !!". Il faut vraiment une distance à ce moment là, surtout quand antérieurement on a passé quasiment 20 ans à jouer des rôles dans lesquels tout le monde vous aime parce que vous êtes une victime, où vous êtes tellement attachante et généreuse... C'est pour cela que les stars font rarement des rôles très antipathiques ! Si on veut vraiment être une star, adorée du public, il faut faire des rôles dans lesquels le public vous aime. Et du coup, j'ai toujours pensé que l'on croit que le star system donne toutes les libertés à l'acteur de choisir, alors que plus on est star, plus le choix est restreint. Enfin.. risque d'être restreint ! Dieu sait qu'il y a des stars qui arrivent, Meryl Streep par exemple que je trouve géniale, à jouer des rôles antipathiques. Je n'ai pas pu regarder "Le diable s'habille en Prada" parce que l'histoire ne m'a pas intéressée, mais le peu que j'ai vu... Elle est odieuse ! On a envie de la battre du début à la fin, bien que je n'aie pas vu la fin...
Complètement même ! Mais c'est pour dire qu'elle prend des risques en tant actrice tout en étant star.
Vous avez tourné sous la houlette des plus grands réalisateurs : Allen, Mocky, Granier-Deferre, Vadim... C'est vous qui vous adaptez au metteur en scène ou est-ce le metteur en scène qui s'adapte à vous ?
Vous remarquerez que j'ai cité Jean-Pierre Mocky...
Oui mais Mocky il est fou, ça c'est autre chose ! (elle rit). Il est fou à lier. Il ne dirige pas, Mocky ! J'ai tourné avec lui et il ne dirige pas du tout. Il dit "Moteur" c'est tout. Les gens avec qui j'ai tourné et qui dirigent (elle réfléchit)... Wajda, André Delvaux... Tacchella ne dirige pas ! Il a écrit son scénario, il a fait sa distribution, il dirige dans la vitesse et dans le déplacement, mais profondément sur les rôles, il ne dirige pas ! Il y a très peu de metteurs en scène de cinéma qui dirigent ! C'est surtout les metteurs en scène de théâtre qui dirigent...et encore, pas tous ! Mais effectivement, je pense que, quand le rôle est bien distribué et quand le metteur en scène ne s'est pas trompé...quand il a distribué un rôle vraiment en fonction de l'acteur et non pas de l'affiche qu'il est en train de faire pour faire plaisir à Canal +, ou au distributeur...(elle réfléchit) Vous savez, quand la caméra est sur quelqu'un, elle va chercher des choses que même un metteur en scène ne peut peut-être pas expliquer, qui est la rencontre entre le rôle et un acteur qui connait son métier...(elle souffle) il ne se trompe pas tellement non plus ! Alors, il y a des jeunes acteurs, des acteurs moins doués... J'ai vu des metteurs en scène faire refaire une scène 17, 18 fois à un acteur... J''en étais malade pour eux !
Vous croyez que quand on refait une scène autant de fois, on perd l'essence du jeu ?
Non, mais cela devient mécanique. Jouer 17 ou 18 fois la même scène... Uniquement pour le jeu ! Parce que quand on la refait pour des problèmes techniques, un camion qui passe, un avion...C'est malheureusement des problèmes du cinéma. Mais quand vous faites refaire 20 fois une scène à un acteur parce qu'il n'arrive pas à ce que vous voulez...C'est mauvais signe quand même...D'ailleurs, je dis toujours que j'ai plus le trac au cinéma qu'au théâtre. On me dit : "ah bon, mais au théâtre, il y a le public !". Oui, mais au théâtre, quand on arrive sur scène, on a répété et répété... Bien sûr, les deux ou trois premières représentations, on arrive sur scène, on a une petite appréhension, mais en même temps on sait exactement où on va. Alors qu'au cinéma, quand on part le matin pour tourner une journée, et bien on sait que quoi qu'il arrive, c'est tourné. Et combien de fois on rentre chez soi en se disant qu'on aurait du le faire un peu autrement, mais c'est fini ! Et les gens croient que, parce que c'est du cinéma, on peut recommencer, on a toute liberté. Mais je leur dis : "Attendez ! si un acteur, à la troisième, quatrième, cinquième prise, n'est toujours pas bon, il y a une tension dans l'équipe !!" Quand on sait qu'on a cinq ou six autres scènes à tourner dans la journée, il y a une tension !! Et puis il y a les autres acteurs, le metteur en scène, le producteur !! Non ! On ne peut pas recommencer indéfiniment. A un moment donné, il faut être juste. Alors qu'au théâtre, tous les soirs on se dit (elle prend un air malicieux) : "demain, je ferai cela autrement... ou "tiens, je vais essayer ça"...C'est toujours en devenir le théâtre. Le cinéma, c'est la guillotine : c'est tombé, c'est fait, il n'y a plus moyen de faire autrement...
En fait, le metteur en scène a les clés...
Il a les clés parce qu'il a le montage ! Avec ce dernier, il fait ce qu'il veut.
Vous avez été mariée à l'un des plus grands séducteurs du cinéma français (Roger Vadim). Un homme incroyablement séducteur...
Il vous a tout de même séduit...
Oui, mais je l'ai séduit aussi !! (Nous rions tous les deux et son regard devient pétillant). Il n'a pas fait la danse du ventre pour me séduire. (D'un ton très doux) Il n'a eu qu'à paraître...
Je n'ai pas eu la chance de le rencontrer, mais il paraît qu'il avait une aura incroyable...
Ah oui. Incroyable... (sa voix se fait très douce)
(Elle boit une gorgée d'eau) C'est drôle... Je suis en train d'écrire un livre... Donc, on parle évidemment beaucoup de ça...
Cela ne va pas se dire en trois phrases parce que c'est quand même une histoire incroyable... Je crois d'abord que c'était le bon moment pour que l'on se rencontre tous les deux, on était au bon moment de notre vie pour une histoire comme celle là. Tous les deux, on avait bourlingué, on avait eu des vies très très riches (elle rit), et en même temps, on croyait beaucoup aux relations homme/femme, à la fois à tout ce que l'on peut donner à l'autre, mais aussi la liberté qu'on veut garder, enfin... sur laquelle on construit un couple. Il avait autant le sens de la liberté pour lui que pour l'autre. Moi, je ne supporte pas qu'on puisse porter atteinte à ma liberté...J'ai beaucoup de mal. Donc, on était exactement sur la même longueur d'ondes. On avait...(elle réfléchit)... L'amour ne s'explique pas ! La rencontre, le désir, au départ, ça ne s'explique pas. Mais après, pourquoi ça dure ?... C'est quand vraiment deux caractères sont faits pour se rencontrer, s'adapter l'un à l'autre. Nous n'avons eu aucun effort à faire mais en même temps, on a eu la certitude l'un et l'autre que c'était la grande affaire de notre vie, et qu'on n'allait pas la rater. De plus, on avait assez d'expérience pour savoir ce qu'il ne fallait pas faire ! (elle rit).
12. On a été mariés 10 ans et 2 ans de vie commune.
J'ai lu plusieurs ouvrages sur Roger Vadim, et tous font référence au charisme qui se dégageait de lui quand il apparaissait...
(elle s'enflamme) Partout ! Mais partout ! Aussi bien dans la rue, aussi bien avec des gens très simples... C'était quelqu'un qui était très très ouvert aux autres et il était plutôt plus timide et réservé quand il était dans une société de cinéma avec des gens de cinéma. Là où il était vraiment à l'aise, c'était, par exemple, dans les bistrots car il jouait beaucoup au PMU. Il jouait bien, il gagnait, et on a vécu sur le PMU à plusieurs occasions (elle rit)...Quand il n'y avait plus d'argent dans les caisses, je lui disais : "vas-y, il faut jouer !!"... Vous savez, dans les cafés PMU, on est en contact avec des personnes assez simples et il se faisait des copains de bistrot qui étaient extraordinaires. Il pouvait passer une heure à écouter quelqu'un lui raconter des histoires qui, à priori, n'étaient pas absolument urgentes pour lui. Il avait un vrai amour des êtres humains, donc son charisme était effectivement total. Alors, on riait beaucoup parce qu'un jour, dans un journal, on avait parlé de lui comme d'un mythe, et comme il avait beaucoup d'humour, on s'amusait à l'appeler "la Mite". Alors,quand on arrivait , quelque part, par exemple dans un petit magasin de journaux d'un village reculé de la campagne française, et qu'on le reconnaissait, il me disait : "Tu as vu ? La mite a encore frappé !"... (elle rit).. Vous savez, les gens l'aimaient ! Parce qu'il était gentil, aimable, et en plus il était beau ! Ils l'avaient vu dans les journaux associé à des femmes magnifiques... Les gens l'aimaient vraiment en tant que personne, pas en tant que metteur en scène vedette !
Au théâtre, il y a eu une pièce de Claudel, je suis très proche de l'univers de Paul Claudel, qui s'appelle "Partage de midi". Déjà, on pourra dire que c'était un pic parce que quand j'avais 16 ans et que je me projetais dans une future carrière d'actrice, je me disais que si je ne jouais pas cette pièce un jour, je serai passée à coté de l'essentiel. Donc, c'est bien venu quand je l'ai jouée sur deux saisons, partout. Et puis je dois dire que l'année dernière, j'ai jouée une pièce extraordinaire qui s'appelle "L'allée du roi" qui est un monologue. Madame de Maintenon qui raconte toute sa vie, pratiquement depuis sa naissance jusqu'à sa mort, avec le moment où elle a épousé Louis XIV. Seule en scène pendant deux heures dix, ça a été un très grand moment. D'ailleurs, je reprendrai un jour ou l'autre, mais avec une mise en scène plus simple, plus légère, car c'était un peu lourd à porter. Je l'ai joué d'ailleurs à Porto-Vecchio et dans pas mal d'endroits, mais je l'ai surtout joué à Paris pendant trois mois et demi l'année dernière. Le théâtre de toute façon ne s'arrêtera jamais pour moi et, si ça se trouve, le plus grand moment de théâtre reste encore à venir...Mais "Le partage de midi" reste un sommet. Au cinéma, ça c'est clair, c'est un film d'André Delvaux, un cinéaste belge, qui s'appelle "Femme entre chien et loup". C'est un des plus beaux rôles et un des plus beaux tournages parce que ce cinéaste était à la fois fort et en même temps nuancé, très à l'écoute des acteurs. C'est à la fois l'histoire d'une femme, et en même temps l'histoire de la Belgique avec la guerre, la résistance, la collaboration, les nazis etc... et le rôle de cette femme, c'était comme incarner un destin qui collait à un pays. C'est ma plus belle aventure parce qu'elle a été pleine et riche du premier au dernier jour. Maintenant, il y a quelquefois des rencontres, mais ce sont des rencontres plus ponctuelles... "Femme entre chien et loup" a rencontré un bon succès, d'ailleurs il a représenté la Belgique au festival de Cannes.
Marie Curie est un grand souvenir. En plus, jouer cette femme était mon idée. Ça m'a pris du temps pour la mettre au point... C'est curieux de jouer des gens qui ont vraiment existé. En même temps, on oublie un peu qu'on joue quelqu'un qui a existé. Il y a un moment donné où ça devient une interprétation libre de la personne. Mais cela dit, j'adore cette femme ! J'ai l'impression que j'ai un peu vécu à coté d'elle, que j'étais un petit peu en visite chez elle, ce qui n'existe pas pour des rôles inventés, des rôles de fiction. On invente un rôle, il n'existe que par vous parce que vous le jouez. Et même s'il y a un remake, comme par exemple celui de "Cousin, cousine", un film américain invraisemblablement crétin qui n'avait aucun rapport... Racheter les droits d'un scénario pour faire un film qui dit totalement le contraire de ce que disait le premier film... Je ne sais pas pourquoi ils ont fait ça. Invraisemblable !! (en colère). Et cette pauvre Isabella Rossellini, qui est une fille que j'aime beaucoup, ça n'a rien à voir avec elle... On lui faisait faire exactement le contraire...C'est pour vous dire qu'un rôle appartient à un acteur quand il a été inventé par un scénariste. Dominique Blanc a tourné "L'allée du roi" pour la télévision avec Didier Sandre... Et bien, elle, elle était Madame de Maintenon, et puis après c'était moi Madame de Maintenon, et puis il y en aura d'autres. Isabelle Huppert a joué Madame de Maintenon dans un film qui s'appelait "Saint-Cyr"... Ces rôles appartiennent à tout le monde. A un certain moment, on se les approprie, et puis après on les laisse. Marie Curie a été jouée par de multiples actrices...